Crise du Mali, réalités géopolitiques : première partie, par Aymeric Chauprade,

operation-serval-2

 su www.realpolitik.tv

Con traduzione in calce di Giuseppe Germinario

 

Publié par Aymeric Chauprade le 20 janvier 2013

 

L’intervention du Mali, comme toutes les interventions occidentales depuis la fin de la Guerre froide (de l’Irak jusqu’à la Libye en passant par l’ingérence en Syrie) ne saurait être analysée de manière angélique, sous prétexte qu’elle serait une opération française. Inversement, elle ne saurait être assimilée à toutes les autres opérations parce qu’elle admet en effet ses propres déterminants.

La guerre au Mali est la confrontation d’une multiplicité d’acteurs :

  1. l’État central malien (Bamako)
  2. les Touaregs indépendantistes de l’Azawad
  3. les groupes jihadistes
  4. l’État français et sa compagnie pétrolière Total (qui est certes une multinationale sur le plan capitalistique mais dont l’action politique reste coordonnée à celle de la France),
  5. l’État algérien avec d’une part son État profond (le puissant DRS, la sécurité militaire, coeur du régime) d’autre part sa société pétrolière étatique Sonatrach
  6. les États-Unis d’Amérique et leur État profond (composé d’éléments de la CIA, du Pentagone, de l’armée)
  7. l’État qatarien et ses intérêts pétroliers et gaziers
  8. deux États voisins, la Mauritanie et la Libye qui ont toujours joué un rôle crucial dans la question touareg.

Ce sont là les principaux protagonistes de l’affaire malienne. Au second plan, d’autres acteurs chargés d’apporter aux acteurs de premier plan une légitimité en terme de droit international : les autres États africains (la CEDEAO), l’Union européenne…

Voyons les intérêts et les motivations des premiers rôles qui s’affrontent sur la scène malienne, et pas forcément de manière visible.

Cette analyse étant longue, j’ai décidé de la découper en deux parties. La première partie tentera d’y voir clair sur les motivations de l’État malien, des Touaregs indépendantistes et des groupes islamistes.

La seconde partie abordera la question complexe des enjeux pétroliers et gaziers dans la zone (avec notamment les intérêts pétroliers français, qataris et algériens).

Nous pourrons alors proposer une lecture de la crise qui s’articulera autour d’un bras de fer entre Paris, Alger et Doha pour l’essentiel, avec bien entendu aussi les États-Unis en « embuscade » et qui montrera, une fois de plus, que le terrorisme islamiste est largement instrumentalisé pour consolider ou restaurer les intérêts des principaux acteurs.

1) L’État malien

Afin de présenter l’État malien dans ses caractéristiques géopolitiques je m’appuie sur l’article « Mali » du Dictionnaire de géopolitique (Chauprade/ Thual) lequel date de 1999 dans sa deuxième édition. L’exercice consistant à revenir à ses anciens textes est peu pratiqué en France, et pour cause : s’il l’était, il abîmerait fortement la légitimité de la quasi-totalité de nos commentateurs médiatiques, surtout Olivier Roy, le génial visionnaire de la « fin de l’islam politique » (titre de son essai de 1992) lequel fanfaronnait encore sur les plateaux au début des printemps arabes, en 2011, en expliquant que sa thèse de la disparition de l’islamisme était la bonne et que la masse arabe ne rêvait que de démocratie occidentale… Cela fait penser à Francis Fukuyama s’excusant que la Fin de l’Histoire soit autant retardée depuis 1990 et nous demandant de patienter encore un peu (pour avoir raison)…

La réalité, qu’elle nous plaise ou non, est qu’une partie importante des Arabes (mais pas forcément majoritaire) veut refonder la politique de leur pays sur les bases de l’islam politique tout simplement parce qu’elle refuse le mouvement global d’occidentalisation des valeurs; et que par ailleurs il convient, par simple honnêteté intellectuelle (et même si à titre personnel nous n’avons aucune sympathie particulière pour ce type de mouvance) de distinguer l’action terroriste jihadique et les partis politiques islamistes (type Frères musulmans). Si nous ne le faisons pas, nous ne comprendrons jamais pourquoi certains États peuvent avoir intérêt à créer des groupes ultra-radicaux se revendiquant de l’islam dans le seul but de décrédibiliser la masse d’un islam politique que je ne qualifierais pas de modéré (parce que cela ne veut rien dire) mais qui pour autant n’emploie pas forcément la violence terroriste comme moyen d’action politique.

Fermons la parenthèse.

Cet article « Mali » du Dictionnaire de géopolitique permet de rappeler deux idées essentielles :

– premièrement la trace de l’action coloniale au Mali : les soldats français de l’opération « Serval » disposent en effet comme référence des « grands anciens de la colonisation » et d’une littérature militaire coloniale de qualité.

– deuxièmement la coupure raciale qui caractérise le Mali.

« Le territoire du Mali correspond à l’ancien Soudan de l’Afrique occidentale française (A.O.F.). Ce territoire avait été conquis au XIXe siècle (Faidherbe puis Gallieni, 1880-1895) dans le cadre de la course au Niger menée par les autorités coloniales françaises (…). Sa base territoriale est formée par le bassin du Haut Niger et la boucle du fleuve Niger. Le territoire a subi de nombreuses mutations, à commencer par l’incorporation temporaire de la Haute-Volta (actuel Burkina-Faso) qui sera de nouveau détachée en 1919, puis la rétrocession à la Mauritanie de territoires du Nord-Ouest.

À l’indépendance en 1958, le Soudan devenu Mali (du nom d’un prestigieux empire mandingue au XIVe siècle) fusionna un temps avec le Sénégal.

Le Mali est formé d’une partie sahélienne et d’une partie saharienne qui s’articulent sur un bassin fluvial autour duquel irradient d’anciennes routes commerciales. Cette division géographique est aussi à l’origine de la division géopolitique du pays entre une masse de populations négro-africaines sédentarisées et une minorité de nomades qui vivent au Nord et qui occupent une grande superficie. Ces nomades, Touaregs ou Maures, sont entrés en rébellion dans les années 1990. Plusieurs mouvements se sont créés qui ont tous un but commun : la création de l’Azawad. En dépit des différentes tentatives de règlement, la césure sociale et ethnique demeure profonde. Elle s’insère dans les conflits qui secouent la bande sahélienne, de la Mauritanie au Tchad. Les différents mouvements en faveur de la libération de l’Azawad bénéficient du soutien discret de la Libye ou de la Mauritanie (…)

La parcellisation des mouvements de libération de l’Azawad ne doit pas masquer la profondeur de leur opposition au gouvernement central. La faiblesse de l’unité intérieure du Mali constitue sans doute la caractéristique géopolitique majeure de ce pays« .

13 ans après que ces lignes aient été écrites, et donc en janvier 2012, revenant de Libye après la chute de Kadhafi (avec lequel ils étaient alliés), les Touaregs du MNLA (Mouvement National de Libération de l’Azawad) défont l’armée malienne et proclament l’indépendance de l’Azawad. Mais la lutte séparatiste ancienne menée par le MNLA est très vite débordée par une autre lutte, celle du jihad (lutte qui, en Afrique occidentale, n’a rien de nouveau, bien au contraire : je renvoie à ce propos à mon ouvrage Géopolitique, Constantes et changements dans l’histoire, Ellipses, 2007, p314 à 325 : l’islamisation de l’Afrique noire).

Trois groupes principaux mènent ce jihad dans la région : Ansar Dine fondé par un leader historique du mouvement touareg, passé à la lutte islamiste ; le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest – MUJAO – et enfin Al Qaïda au Maghreb islamique – AQMI groupe historiquement beaucoup plus algérien puisqu’il est l’héritier du GSPC lui-même héritier des GIA de la guerre civile algérienne.

Début avril 2012, le MNLA et ces groupes islamistes prennent le contrôle des capitales des 3 régions du Nord-Mali : Kidal, Gao et Tombouctou. Le 6 avril, le MNLA proclame l’indépendance de l’Azawad, ce qui était son but historique. Mais voilà que ce qui était prévisible se produit : l’islamisme submerge le nationalisme touareg, d’autant que le premier est susceptible de trouver bien davantage de soutiens extérieurs que le second. Fin juin 2012, le trio AQMI/MUJAO/Ansar Dine écrase le MNLA à Gao puis à Tombouctou. Commence la triste destruction de mausolées de saints musulmans à Tombouctou (représailles à la décision de l’Unesco de classer la ville patrimoine mondial en péril).

Mais revenons à Bamako. Le but premier de l’État malien est de reprendre le contrôle du Nord et de se venger des Touaregs en s’appuyant sur la puissance française. C’est évidemment un but politiquement dangereux pour la France. Pour Paris, chasser les groupes islamistes du Nord du Mali ne doit pas pour autant déboucher sur une épuration ethnique anti-Touareg. À mesure que l’armée française va s’approcher de ses objectifs (faire reculer son ennemi) elle va se rendre compte que l’armée malienne qu’elle traîne dans son sillage s’emploiera à se venger sur les populations touaregs et cela risque de devenir un vrai problème à gérer pour Paris.

Incapable militairement de résister face aux guerriers du désert, l’armée négro-africaine malienne, même aidée par d’autres troupes noires (CEDEAO) se trouve dans l’incapacité de restaurer l’unité du Mali (unité ô combien artificielle, comme nous l’avons vu auparavant) sans l’action militaire de la France.

2) Les Touaregs indépendantistes du MNLA

Les Touaregs sont 1,5 millions de nomades du Sahara (origine berbère mais métissage avec des Noirs et des Arabes) vivant sur plus de 2 millions de km2 (Niger, Mali, Algérie, Libye, Burkina Faso), souvent en marge de leur État d’appartenance.

Au Mali, dans la région de l’Azawad, ils seraient environ 500 000 sur une population de malienne de 6 millions (au Niger les Touaregs sont 850 000 sur une population quasiment identique à celle du Mali soit 16 millions). Ce qui revient à souligner qu’une minorité d’un demi-million est en train d’écraser l’armée représentant la sécurité et les intérêts de 15,5 millions de citoyens maliens noirs ! Qui pourra contester à la France qu’elle se bat bien aux côtés de l’écrasante majorité de la population, laquelle, et c’est un fait établi et difficilement contestable, est attachée à son islam trempé de traditions africaines et refuse le modèle salafiste importé ? Affirmer cela ne signifie pas pour autant nier ou cacher le fait que la France a ses propres intérêts. Hollande dit que la France ne défend pas d’intérêt au Mali, c’est évidemment une plaisanterie (dictée par la sacro-saint principe d’hypocrisie droits-de-l’hommiste), plaisanterie sur laquelle nous reviendrons. Bien au contraire, je dirais serais tenté de dire, de manière un peu provocante, que cela fait bien longtemps que la France mène une guerre pour ses intérêts propres et non pour des profits américains. La France a le droit d’avoir ses intérêts, comme n’importe quel autre État, et de les défendre, du moment que la défense de ses intérêts reste compatible avec la volonté majoritaire des populations concernées et que nous ne sommes pas en train de tout détruire pour nous emparer du pétrole, comme les Américains l’ont fait en Irak en 2003 et comme nous tentons malheureusement de le faire en Syrie, aux côtés des Américains, des Anglais et des Qataris.

Dans le passé les Touaregs étaient loin d’avoir une position défavorable. Avant la colonisation française, ils étaient même les seuls, avec les Ethiopiens, à disposer de leur propre écriture et ils contrôlaient le commerce caravanier et d’immenses troupeaux. Avant la colonisation française – je renvoie encore à Géopolitique, constantes et changements dans l’Histoire ouvrage dans lequel j’analyse les mécanismes par lesquels la la colonisation a abouti à l’inversion des rapports de force entre les ethnies traditionnellement dominantes et celles qui étaient dominées-, ce sont les Touaregs qui razziaient les Noirs d’Afrique et les Maliens redécouvrent aujourd’hui cette vérité. La vérité est que la colonisation a souvent été un cadre pacificateur (on parlait d’ailleurs de pacification) et protecteur pour les ethnies dominées d’Afrique noire. Elle a en revanche été une catastrophe et une perte de puissance pour les ethnies anciennement dominantes. En refusant, par exemple, l’école française de la colonisation, les Touaregs ont créé eux-mêmes, au moment des indépendances, les conditions de leur marginalisation au profit des Noirs.

Lorsque s’effondre ce cadre de la Guerre froide qui avait gelé tant de conflits identitaires dans les États, les Touaregs relèvent la tête et entrent en rébellion au Niger et au Mali. Finalement en 2009, des accords de paix aboutissent théoriquement à un décentralisation des régions touaregs assortie d’une large autonomie de gestion. Comme ces accords ne sont pas appliqués, plusieurs ex-leaders touaregs qui avaient été intégrés dans l’armée maliennes désertent. Le problème est d’autant plus grave que les Américains (je reviendrai sur ce point capital), dans le cadre de leur coopération militaire anti-terroriste avec le Mali et avec de nombreux autres États de la zone (la Pan Sahel Initiative qui deviendra la TSCI), ont souvent choisi de s’appuyer sur des officiers touaregs – avaient-ils une idée machiavélienne derrière la tête ou agissaient-ils ainsi de manière pragmatique parce qu’ils constataient que les Touaregs sont les meilleurs combattants?

Dans cette affaire la chute de Kadhafi, voulue et provoquée, faut-il le rappeler, par la présidence de Nicolas Sarkozy en accord avec les Américains et les Anglais, est directement à l’origine de ce qui se passe aujourd’hui au Nord-Mali. Lorsque les forces kadhafistes s’effondrent, les centaines de Touaregs du MNLA qui combattaient à leurs côtés rentrent précipitamment au pays lourdement armés et rallument la flamme combattante du séparatisme. En janvier 2012, la rébellion touareg, dont la composante essentielle est le MNLA, demande explicitement l’indépendance du Nord-Mali et passe à l’offensive.

Depuis, le MNLA a été dépassé militairement par les trois groupes islamistes (Ansar Dine, Mujao et AQMI) mais il conserve pourtant le gros des effectifs car seule une petite fraction de ses membres a rallié Ansar Dine.

Aucune sortie durable de la crise n’est en réalité possible sans le MNLA. Une entente doit se faire entre Bamako/Paris d’un côté, le MNLA de l’autre, afin de régler la question islamiste dans la zone. Paris est en position de force car Bamako ne peut plus rien sans les troupes françaises et par conséquent les militaires français doivent s’allier avec le MNLA, composante séparatiste mais non jihadiste des Touaregs, pour chasser les islamistes de la zone. S’ils l’armée française ne sous-traite pas aux Touaregs le « nettoyage » de cet immense espace à la fois désertique et montagneux, elle entrera dans un tunnel sans fin et sans doute plus coûteux financièrement que meurtrier (car militairement l’opération restera beaucoup plus maîtrisable que l’Afghanistan). Ensuite, la France doit se placer en position de médiation entre le MNLA et Bamako. L’affaire est cependant plus complexe qu’il n’y paraît. Il n’existe pas un, mais trois Azawad : le Sud (Songhay et Peuls), le long du Niger, le Nord territoire des Touaregs et l’Ouest saharien arabe.

3) Les groupes jihadistes

Il est rapporté que 3 groupes islamistes se trouvent impliqués dans l’affaire du Nord-Mali. Deux groupes qui présentent un caractère identitaire local : Ansar Dine, émanation islamiste radicale du MNLA, le mouvement historique de combat des Touaregs et dont la base originelle est Kidal ; le Mujao (base Gao) ; AQMI qui lui est un ensemble de groupe beaucoup plus algérien et qui s’inscrit dans la filiation GIA/GSPC.

Mon analyse sur l’islamisme radical et terroriste est bien connue. Pour chaque mouvement identifié et analysé il convient de se poser deux questions :

  1. Quelle est la part locale et la part globale (le lien avec une « internationale » islamiste) ?
  2. Quelle est la part authentique (combattants authentiquement islamistes) et la part infiltrée/fabriquée (groupe infiltré par des services étatiques et dont les actions orientées obéissent à une stratégie de la tension de la part d’un ou plusieurs États) ?

Nous n’avons pas le temps de refaire ici l’histoire du terrorisme islamiste et celle-ci a d’ailleurs été abondamment traitée. Pour dire les choses simplement, deux lectures s’opposent. Une première lecture, dominante, médiatique est celle qu’Al Qaïda, et plus globalement le « terrorisme international », sont des forces autonomes, obéissant à leur propre agenda, et qui mènent une guerre contre l’Occident. La deuxième lecture (qui est la mienne) considère le terrorisme islamiste comme la combinaison d’un combat authentique (des jihadistes mènent réellement une guerre terroriste contre « l’Occident impie ») et d’une instrumentalisation/manipulation de la part de services étatiques.

Or, on ne peut comprendre cette deuxième lecture si l’on occulte la dimension mafieuse du phénomène jihado-terroriste. Cette dimension mafieuse est admise dans les deux lectures. Les médias officiels ne manquent pas de souligner en effet qu’AQMI (Al Qaïda du Maghreb islamique) travaille main dans la main avec les cartels colombien et venezuelien pour faciliter l’acheminement par voie aérienne de cargaisons de drogue vers le désert saharien, laquelle drogue repartirait ensuite vers l’Europe. Ils parlent de « Mister Malboro » à propos du terroriste Mokhtar Ben Mokhtar ceci afin de bien souligner son implication dans des trafics de cigarettes. Mais trafics de drogue, cigarettes, et même immigrés clandestins, autant que prises otages sont les diverses facettes d’une économie du crime que contrôlent ces groupes sahariens, dans la droite ligne de la contrebande saharienne la plus ancienne. Rien de neuf sous le soleil saharien.

En insistant d’ailleurs tellement sur cette dimension mafieuse (laquelle, je le répète, n’est contestée par personne), les médias finissent par nous amener à nous demander ce qui compte le plus pour ces terroristes : l’argent (le trafic) ou le jihad? L’argent mafieux sert-il à financer le jihad ou bien le jihad n’est-il qu’un alibi pour couvrir le trafic? Difficile de répondre mais ce qui est certain est que la confusion entre argent sale et idéologie montre que ces groupes peuvent accueillir en leur sein (et même à leur tête) des infiltrés n’ayant d’autres but que de mettre l’action terroriste en conformité avec l’agenda du service d’État qu’ils servent.

Ce que je crois, c’est qu’Al Qaïda est un instrument de l’État profond américain qui justifie, depuis la fin de la Guerre froide, une bonne partie de la projection de puissance américaine, et qu’AQMI est le faux-nez maghrébin de cet instrument occulte, mais avec une différence notable avec les autres composantes régionales d’Al Qaïda (Afghanistan, Irak, Yémen…) : l’État profond américain ne contrôle pas directement AQMI. C’est en effet très probablement le DRS algérien, la sécurité militaire algérienne, qui contrôle AQMI. Là encore la démonstration serait longue à donner mais elle existe et elle a été donnée depuis longtemps par des auteurs suisses, britanniques ou allemands mais hélas pas français car en France tout le monde craint l’Algérie et ses coups tordus. J’en profite pour dire que sur ce sujet je suis ouvert au débat mais certainement pas avec les disciples de Glucksmann ou Lévy qui d’un côté ne cessent d’accuser Moscou de terrorisme occulte et de l’autre traitent de complotistes ceux qui ont compris que le premier de tous les « États profonds » était américain!

À propos du DRS, je renvoie ici notamment aux travaux du britannique Jeremy Keenan, ou bien à l’étude extrêmement pointue « Al Qaïda au Maghreb ou l’étrange histoire du GSPC algérien » par François Gèze et Sallima Mellah (Septembre 2007). Il ne fait aucun doute que les GIA ont été créés durant la guerre civile algérienne, en tant qu’organisation contre-insurrectionnelle, dans le but premier de discréditer, par des crimes atroces perpétrés contre la population, le combat armé d’un Front Islamique du Salut (pour lequel, je tiens à le préciser, je n’ai aucune sympathie, bien au contraire) qui avait gagné les élections. Il ne fait guère de doutes non plus que ces GIA se sont transformés en GSPC après la guerre civile et sont montés en puissance après le 11 septembre 2001, lorsque l’État profond algérien a compris, non seulement que l’État profond américain était derrière Al-Qaïda, mais que si Alger ne voulait pas subir l’agenda américain dans le Sahara, il fallait devancer celui-ci. Le GSPC est né du « magnifique » esprit d’initiative algérien lequel a su offrir aux Américains l’ennemi qu’ils attendaient (jusqu’à prendre en 2007 le nom d’Al Qaïda du Maghreb islamique) pour justifier leur implantation dans le Sahara (implantation au service d’autres intérêts plus classiquement géostratégiques, pétroliers et gaziers, dont nous parlerons après). Au fond, les Abdelrrazak El Para et autres Mokhtar Ben Mokhtar, ces personnages qui ont dirigé actions terroristes et prises d’otages occidentaux, sans jamais se faire prendre et en laissant leurs acolytes se faire tuer à leur place, présentent le même profil qu’Oussama Ben Laden mystérieusement porté disparu en mer. Ils ont d’abord travaillé pour l’État profond de l’État qu’ils se sont mis ensuite officiellement à combattre. Ben Laden fut membre de la CIÀ et quasiment tous les chefs des katibas islamistes du GSPC puis d’AQMI sont d’anciens officiers de l’armée algérienne. Bien formés ces officiers, après avoir infiltré (peut-être créé dans certains cas) les cellules combattantes ont pu en prendre aisément le commandement.

Une réalité indicible dans nos médias, du fait de l’ampleur des intérêts économiques français en Algérie, de la collusion aussi des élites politiques françaises avec le régime algérien (il fallait voir encore récemment le ministre Valls louer l’efficacité des forces spéciales algériennes…)… mais une vérité pourtant depuis longtemps évidente en dehors de France: AQMI/Polisario, DRS algérien le trafic de drogue saharien sont une seule et même organisation du crime dont le but est double : l’enrichissement personnel des généraux algériens bien sûr lesquels supervisent le trafic de drogue réalisé par les chefs terroristes ; mais aussi la survie du régime (laquelle va de paire avec le premier but) en faisant de celui-ci l’incontournable rempart contre le fondamentalisme, un rempart que la vague de révolutions arabes ne saurait attendre, et qu’elle n’atteindra d’autant moins que les Occidentaux (en premier lieu Américains et Français comprendront qu’il n’y a d’autre alternative crédible que le maintien du régime algérien). Or ce régime est une calamité pour la jeunesse algérienne, privée d’avenir, au chômage à 40%, volée par son « élite » de ses richesses fabuleuses (rente gazière et pétrolière), et par voie de conséquence une calamité pour la rive nord de la Méditerranée (Europe) qui, inéluctablement, verra fondre sur elle des candidats à l’immigration de plus en plus nombreux. Une politique de courte vue de plus de la part des dirigeants européens!

Grâce au GSPC et à AQMI, l’État algérien a pu apparaître depuis 2001, aux yeux des États-Unis et de la France (pour le grand public du moins, car dans les structures de pouvoir personne n’est dupe) comme un rempart contre l’islamisme radical dans la région. Et la stratégie a fonctionné, jusqu’aux révolutions arabes qui ont emporté les uns après les autres (Tunisie, Egypte, Yémen) tous les régimes autoritaires « laïcisants » (terme à prendre avec extrême précaution s’agissant de pays musulmans), avant que l’Occident ne s’en prenne ensuite directement à ceux qui ne tombaient pas d’eux-mêmes (Libye, Syrie). Donc pour le DRS cela ne faisait pas l’ombre d’un doute, l’Algérie était la suivante sur la liste, à moins d’écarter l’Occident du sillage des islamistes politiques (ceux qui allaient devenir majoritaires dans de nombreux pays à la suite de l’écroulement des régimes forts) et de le ramener à la « grande époque » de la guerre contre le terrorisme international.

Parmi ces trois groupes islamistes agissant au Mali, si l’on me demandait « qui contrôle qui », je répondrais que le DRS contrôle d’abord AQMI tandis que le Qatar finance et a de l’influence sur les deux autres mouvements (MUJAO et Ansar Dine) avec des buts radicalement différents de l’Algérie comme nous le verrons dans la deuxième partie.

Un autre élément qui n’est pas souligné est qu’au moins deux de ces groupes (le MUJAO c’est certain, AQMI c’est probable) ont des contacts forts avec le POLISARIO, mouvement séparatiste sahraouï soutenu basé dans les camps de Tindouf (territoire algérien). Il est quasiment avéré en effet que le groupe de terroristes qui s’est emparé du site gazier d’In Amenas en Algérie venait des camps de Tindouf, autrement dit qu’il est bien parti du territoire algérien (et ceci bien que l’Algérie ait pointé du doigt la Libye). Là encore il s’agit d’une réalité sur laquelle je tente d’alerter au moins depuis 2005, à travers les différentes interventions que j’ai faites à la tribune de l’ONU, en tant qu’expert mandaté par la partie marocaine, rôle que j’assume pleinement tant je crois au bien fondé historique de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental – mais une souveraineté « intelligente » dans un cadre d’autonomie élargie.

Le glissement progressif (comparable à celui du MNLA) du mouvement Polisario non seulement vers la criminalité (trafics en tous genres) mais aussi vers le fondamentalisme religieux devrait être une source de préoccupation pour les pays occidentaux. Nombreux sont les événéments, depuis 2005, dans cette sous-région du Sahara, qui montrent des liens entre certains éléments du Polisario et Aqmi/Mujao. C’est le moment de rappeler d’ailleurs que les problèmes non résolus de séparatismes (Sahara occidental et Touaregs) finissent malheureusement par dégénérer en problèmes d’islamisme radical.

Seule une solution équilibrée consistant à défendre la souveraineté des États (Mali, Maroc, Niger…) mais en aménageant des autonomies réelles pour les minorités nomades pourra permettre de ramener la stabilité dans la région.

Pour comprendre les motivations des autres acteurs, il convient aussi de parler des enjeux de ressources (pétrole, gaz, uranium). Autant les États-Unis en effet, que la France, le Qatar ou l’Algérie ont des visées pétrolières et gazières importantes dans le Sahara. Chacun de ces États a intérêt à favoriser la situation géopolitique la plus à même de le placer en position de force dans les discussions relatives au partage des richesses.

Nous analyserons dans la deuxième partie ces enjeux pétroliers et gaziers et affinerons notre analyse des intérêts français, algériens, qataris, américains, mauritaniens et libyens dans la crise actuelle.

Fin de la première partie

Aymeric Chauprade
blog.realpolitik.tv

La crisi del Mali, realtà geopolitiche:  prima parte, di Aymeric Chauprade

Scritto da Aymeric Chauprade 20 gennaio 2013 in articoli

 

L’intervento in Mali, come tutti gli interventi occidentali dalla fine della guerra fredda (dall’Iraq  alla Libia passando per l’interferenza in Siria) non può essere analizzato in modo angelico, con il pretesto che sarebbe un’operazione francese. Al contrario, non può essere paragonato a tutte le altre operazioni perché ammette sue proprie determinanti.

La guerra in Mali è il confronto di una molteplicità di attori:

  1. lo Stato centrale del Mali (Bamako)
  2. I Tuareg indipendentisti dell’Azawad
  3. I gruppi jihadisti
  4. Lo Stato francese e la sua compagnia petrolifera Total roli (che è certamente una multinazionale sul piano del capitalismo, ma la cui azione politica rimane coordinata  a quella della Francia)
  5.  Lo Stato algerino, da una parte il suo Stato profondo (il potente DRS, la sicurezza militare, cuore del regime), dall’altra la sua società petrolifera statale Sonatrach
  6. Gli Stati Uniti d’America e il loro Stato profondo (composto da elementi della CIA, del Pentagono, dell’esercito)
  7. Lo stato del Qatar e i suoi interessi petroliferi e gasiferi
  8. Due Stati vicini, Mauritania e la Libia, che hanno sempre svolto un ruolo cruciale nella questione touareg.

Questi i principali protagonisti del caso del Mali. Sullo sfondo, altri soggetti incaricati di fornire ai protagonisti di primo piano una legittimità in termini di diritto internazionale: gli altri Stati africani (ECOWAS), l’Unione europea …

Vediamo gli interessi e le motivazioni dei primi attori che si affrontano sulla scena del Mali, non  necessariamente in modo visibile.

 

 

Data la sua lunghezza, ho deciso di dividere questa analisi in due parti. La prima parte cercherà di chiarire  le motivazioni del governo del Mali, dei Tuareg e dei gruppi separatisti islamici.

La seconda parte affronterà le complesse questioni del gioco degli interessi petroliferi e gasiferi nella zona (in particolare gli interessi petroliferi francesi, algerini e del Qatar).

Siamo in grado quindi di offrire una lettura della crisi costruita essenzialmente attorno a una prova di forza tra Parigi, Algeri e Doha, con ben inteso gli Stati Uniti in “agguato” e che mostrerà, una volta ancora, che il terrorismo islamico è ampiamente strumentalizzato per rafforzare o ripristinare gli interessi delle principali parti interessate.

1) Il governo del Mali

 

 

 

Per presentare il governo del Mali nelle sue caratteristiche geopolitiche mi riferirò all’articolo “Mali” del dizionario di Geopolitica (Chauprade / Thual), che risale al 1999, nella sua seconda edizione. L’esercizio consistente nel richiamare i propri antichi testi è poco praticato in Francia;  per una buona ragione: se così fosse, avrebbe danneggiato la legittimità stessa di quasi tutti i nostri commentatori pubblici, in particolare Olivier Roy, il grande visionario della “fine dell’Islam politico” (il titolo del suo saggio del 1992) il quale ancora maramaldeggiava dall’alto all’inizio della primavera araba nel 2011con la sua tesi che la scomparsa dell’Islam era corretta e che le masse arabe non sognavano che la democrazia occidentale … Questo ci rimanda a Francis Fukuyama con le sue scuse riguardo al gran ritardo della fine della storia a partire dal 1990 il quale ci chiede di pazientare ancora un po’ (per ottenere ragione) …

La realtà, che ci piaccia o no, è che una parte importante degli arabi (ma non necessariamente la maggioranza) vuole ricostruire la vita politica dei loro paesi sulla base dell’Islam politico semplicemente perché rifiuta il movimento globale di occidentalizzazione dei valori, e che d’altronde è opportuno, per semplice onestà intellettuale (anche se personalmente non abbiamo particolare simpatia per questo tipo di movimento),  distinguere tra il terrorismo jihadista e i partiti politici islamici ( del tipo dei Fratelli Musulmani). Se non lo facciamo, non riusciremo mai a capire perché alcuni stati possono avere interesse a creare gruppi ultraradicali che sostengono l’Islam al solo scopo di screditare la massa di un Islam politico che non qualificherei moderato (perché non significa nulla), ma che fino ad ora non ha usato necessariamente la violenza terroristica come mezzo di azione politica.

 

Chiudiamo la parentesi.

La voce “Mali” del Dizionario di geopolitica permette di ricordare due aspetti fondamentali:

– In primo luogo le tracce dell’azione coloniale in Mali: i soldati francesi dell’operazione “Serval” hanno infatti come punto di riferimento i “grandi vecchi della colonizzazione insediamento” e una letteratura militare coloniale di qualità.

– In secondo luogo la cesura razziale che caratterizza il Mali.

“Il territorio del Mali corrisponde all’ex Sudan dell’Africa Occidentale Francese (AOF). Questo territorio è stato conquistato nel secolo XIX (Faidherbe e Gallieni, 1880-1895) nel contesto della corsa al Niger condotta dalle autorità coloniali francesi (…). La sua base territoriale è costituita dal bacino dell’Alto Niger e dalla foce del fiume Niger.Il territorio ha subito molti cambiamenti, a cominciare dall’inserimento temporaneo dell’Alto Volta (oggi Burkina Faso) in seguito di nuovo separato nel 1919 per finire con la retrocessione alla Mauritania di territori del nord-ovest.

Al momento dell’indipendenza nel 1958, il Sudan diventato Mali (dal nome di un impero Mandingo famoso nel XIV secolo) un tempo si è fuso con il Senegal.

Il Mali è composto da una parte del Sahel e da una parte Sahariana articolati lungo un bacino fluviale attorno al quale si irradiano antiche rotte commerciali. Questa divisione geografica è così all’origine della divisione geopolitica del paese tra una massa di neri africani insediati stabilmente  e una minoranza di nomadi nel Nord i quali occupano una vasta area. Questi nomadi Tuareg o Mauri, sono in rivolta dal 1990. Diversi movimenti si sono formati; tutti con un obiettivo comune: la creazione di Azawad. Nonostante i vari tentativi di risoluzione, la cesura sociale ed etnica rimane profonda. Essa si inserisce nei conflitti che attraversano il Sahel, dalla Mauritania al Ciad. I diversi movimenti per la liberazione di Azawad beneficiano del sostegno discreto di Libia o Mauritania (…)

La frammentazione dei movimenti di liberazione di Azawad non deve far dimenticare la profondità della loro opposizione al governo centrale. La debolezza dell’unità interna del Mali è probabilmente la caratteristica principale geopolitica di questo paese “.

13 anni dopo la tracciatura di queste righe, quindi nel gennaio 2012, scendendo dalla Libia dopo la caduta di Gheddafi (con i quali erano alleati), i Tuareg del MNLA (Movimento Nazionale per la Liberazione del Azawad) sconfiggono l’esercito del Mali e proclamano l’indipendenza dell’Azawad. Ma la lotta guidata storicamente dall’ex MNLA separatista è rapidamente sopraffatta da un’altra lotta, quella della jihad (lotta che, in Africa occidentale, non è una novità, anzi: mi riferisco a questo proposito al mio lavoro Geopolitica costanti e cambiamenti nella storia, ellissi, 2007, 325 P314: islamizzazione dell’Africa nera).

Tre gruppi principali conducono questa jihad nella regione: Ansar Dine fondata da un leader storico del movimento Tuareg, passato alla lotta islamica, il Movimento per l’unicità e la jihad in Africa occidentale – MUJAO – e, infine, Al Qaeda Maghreb islamico – AQIM gruppo storicamente più algerino in quanto erede del GSPC a sua volta erede del GIA nella guerra civile algerina.

All’inizio di aprile 2012, il MNLA e questi gruppi islamisti hanno preso il controllo delle capitali di tre regioni del nord del Mali: Kidal, Gao e Timbuctù. Il 6 aprile, il MNLA proclama l’indipendenza del Azawad, il suo obiettivo storico. Ma ecco che accade quanto era prevedibile: l’Islam travolge il nazionalismo Tuareg, dal momento che il primo riusciva a trovare tanto più supporto esterno rispetto al secondo. Fine di giugno 2012, il trio AQIM / MUJAO / Ansar Dine sovrasta il MNLA a Gao, poi a Timbuktu. Inizia la triste distruzione delle tombe dei santi musulmani Timbuktu (rappresaglia per la decisione dell’UNESCO di classificare la città come patrimonio mondiale in pericolo).

Ma torniamo a Bamako. Lo scopo principale dello stato del Mali è quello di riprendere il controllo del Nord e vendicarsi dei Tuareg appoggiandosi alla potenza francese. Questo è ovviamente un obiettivo politicamente pericoloso per la Francia. A Parigi, la cacciata dei gruppi islamici dal nord del Mali non deve portare a una pulizia etnica anti-Touareg. Nella misura in cui l’esercito francese si avvicinerà ai suoi obiettivi (far arretrare il suo nemico) si renderà conto che l’esercito del Mali nella sua scia cercherà la vendetta contro i Tuareg e questo rischia di diventare un serio problema da gestire per Parigi.

Incapace di resistere militarmente contro i guerrieri del deserto, il esercito nero africano del Mali, anche assistito da altre truppe nere (ECOWAS) non è in grado di ripristinare l’unità del Mali (oh unità artificiale, come abbiamo visto prima), senza l’azione militare in Francia.

2) Il MNLA dei Tuareg separatisti

I Tuareg sono 1,5 milioni di nomadi del Sahara (origine berbera, ma incrocio con neri e arabi) che vivono su più di 2 milioni di kmquadrati (Niger, Mali, Algeria, Libia e Burkina Faso), spesso ai margini del loro stato appartenenza.

Nel Mali, nella regione di Azawad, ce ne sono circa 500.000 su una popolazione di 15 milioni (i Tuareg del Niger sono 850.000 su una popolazione quasi identica a quella del Mali, 16 milioni). Questo per sottolineare che una minoranza di mezzo milione sta per schiacciare l’esercito che rappresenta gli interessi e la sicurezza 15,5 milioni di cittadini neri del Mali! Chi può contestare alla Francia che essa combatte accanto alla stragrande maggioranza della popolazione legata, questo è un dato di fatto difficilmente contestabile, alle sue tradizioni islamiche temperate da quelle africane, ma contraria al modello salafita importato? Dire questo non significa negare o nascondere il fatto che la Francia ha suoi propri interessi. Holland ha detto che la Francia non difende interessi nel Mali; è ovviamente una battuta umoristica(dettata dal principio sacrosanto di ipocrisia dei diritto-umanitaristi ipocrisia); battuta su cui torneremo. Piuttosto, sarei tentato di dire, un po’ provocatoriamente, è tempo che la Francia conduca una guerra per i propri interessi e non per il profitto statunitense. La Francia ha il diritto di avere propri interessi, come qualsiasi altro stato, e di difenderli, fino a quando la difesa dei propri interessi rimane compatibile con la volontà maggioritaria delle popolazioni implicate sarà in questione e sino a che non arriviamo a distruggere tutto per il petrolio, come gli americani hanno fatto in Iraq nel 2003 e, purtroppo, come stiamo cercando di fare in Siria, a fianco degli americani, britannici e Qatar.

In passato i Tuareg erano ben lungi dall’occupare una posizione sfavorevole. Prima della colonizzazione francese, erano gli unici, con gli etiopi, ad avere la loro propria scrittura; controllavano il commercio carovaniero e mandrie immense. Prima della colonizzazione francese – rinvio ancora una volta a “Géopolitique, constantes et….” Opera nella quale analizzo i meccanismi attraverso i quali la colonizzazione ha determinato il rovesciamento delle relazioni di potere tra gruppi etnici tradizionalmente dominanti e quelli che erano dominati, erano i Tuareg che razziavano i neri d’Africa e il Mali sta riscoprendo oggi questa verità. La verità è che la colonizzazione è stata spesso un quadro pacificatore (si parlava d’altronde di pacificazione) e di protezione per le etnie dominate dell’Africa nera. Al contrario, è stato un disastro e una perdita di potenza dei gruppi etnici precedentemente dominanti. I Tuareg, rifiutando, per esempio, la scuola francese di colonizzazione, hanno creato essi stessi, al momento dell’indipendenza, le condizioni della loro emarginazione a favore dei neri.

Quando crolla il quadro della Guerra Fredda che aveva congelato molti dei conflitti di identità all’interno degli stati, i Tuareg alzano la testa ed entrare in ribellione in Niger e nel Mali. Infine, nel 2009, gli accordi di pace portano teoricamente ad un decentramento delle regioni tuareg, insieme ad una vasta gamma di poteri di gestione. Dal momento che questi accordi non sono rispettati, molti leader Tuareg, in precedenza integrati nell’esercito del Mali, disertano. Il problema diventa ancora più grave quando gli americani (tornerò su questo punto importante), nel quadro della loro cooperazione militare  anti-terrorismo con il Mali e molti altri stati della regione (l’Iniziativa Pan Sahel che diventerà il TSCI), spesso hanno scelto di affidarsi ad ufficiali Tuareg – hanno avuto qualche idea machiavellica dietro la testa o si sono comportati in modo pragmatico perché constatavano come i Tuareg fossero i migliori combattenti?

In questo caso la caduta di Gheddafi, voluta e provocata, si deve ricordare, dalla presidenza di Nicolas Sarkozy, in accordo con gli americani e gli inglesi, è direttamente all’origine di ciò che sta accadendo oggi in Nord Mali. Quando le forze di Gheddafi si sfaldano, le centinaia di Tuareg del MNLA che hanno combattuto al loro fianco rientrano precipitosamente nei paesi pesantemente armati da combattimento e riaccendono la fiamma del separatismo. Nel gennaio 2012, la ribellione tuareg, la cui componente essenziale è il MNLA, richiede esplicitamente l’indipendenza del nord del Mali e passa all’offensiva.

Da allora, i militari MNLA sono stati superati militarmente da tre gruppi islamisti (Ansar Dine, Mujao e AQIM), ma ancora conservano la maggior parte della forza, perché solo una piccola parte dei suoi membri si è unita ad Ansar Dine.

Nessuna uscita duratura dalla crisi è in realtà possibile senza il MNLA. Un accordo deve essere fatto tra Bamako / Parigi da un lato, l’MNLA l’altro per risolvere la questione islamista nella zona. Parigi è in una posizione di forza, perché Bamako non può fare nulla senza le truppe francesi e di conseguenza l’esercito francese deve allearsi con il MNLA, componente separatista ma non jihadista dei Tuareg, per cacciare gli islamisti dalla zona. Se l’esercito francese non affida ai Tuareg la “pulizia” di questo enorme spazio desertico e montuoso, entrerà in un tunnel senza fine e probabilmente più costoso economicamente che mortifero (perché l’operazione militare rimane molto più gestibile che in Afghanistan). In seguito la Francia deve posizionarsi per mediare tra il MNLA e Bamako. Il caso è più complesso di quanto possa sembrare. Non c’è un solo, ma tre Azawad: Sud (Songhai e Fulani), lungo il Niger, il territorio dei Tuareg del Sahara settentrionale e il Sahara occidentale arabo.

 

3) I gruppi jihadisti

 

È stato riportato che tre gruppi islamici sono coinvolti nell’affare del nord del Mali. Due gruppi che presentano un carattere identitario locale: Ansar Dine, emanazione radicale islamica del MNLA, il movimento storico di lotta dei Tuareg la cui base originaria è Kidal; il Mujao (base Gao) e infine AQIM, che fa parte di un gruppo molto più algerino  affiliato alla GIA / GSPC.

 

La mia analisi dell’islamismo radicale e del terrorismo è ben nota. Per ogni movimento identificato ed analizzato si pongono due questioni:

  1. Qual è la componente locale e quale quella globale (il legame con la ” Internazionale ” Islamista)?
  2. Qual è la componente autentica (veri combattenti islamici) e la parte infiltrata/fabbricata (gruppi  infiltrati dai servizi segreti le cui azioni orientate obbediscono ad una strategia della tensione da parte di uno o più Stati)?

 

Non abbiamo il tempo di rifare qui la storia del terrorismo islamista, già ampiamente affrontato. Per dirla semplicemente, due letture si oppongono. Una prima lettura, dominante, mediatica recita che Al Qaeda e, più in generale, “il terrorismo internazionale”, sono forze autonome, obbedienti ad una propria propria agenda, e combattono una guerra contro l’Occidente. La seconda lettura (la mia) considera il terrorismo islamico come la combinazione di una guerra autentica (i jihadisti in realtà conducono una guerra terroristica contro gli “infedeli Occidentali”) e una manipolazione / strumentalizzazione dei servizi di Stato .

 

Tuttavia, non si può comprendere questa seconda lettura, se si occulta la dimensione mafiosa del fenomeno del terrorismo jihadista. La dimensione mafiosa è consentita in entrambe le letture. I media ufficiali non mancano mai di sottolineare infatti che AQIM (Al Qaeda nel Maghreb Islamico), lavora a stretto contatto con i cartelli colombiani e venezuelani per facilitare le spedizioni aeree di carichi di droga attraverso il deserto del Sahara, per ripartire in seguito in Europa. Si parla di “Mister Marlboro” a proposito del terrorista Mokhtar Ben Mokhtar questo per sottolineare il suo coinvolgimento nel contrabbando di sigarette. Ma il traffico di droga, sigarette e anche degli immigrati clandestini, così come la cattura degli ostaggi sono i diversi aspetti di una economia del crimine controllata da questi gruppi sahariani sul solco del più antico contrabbando sahariano. Niente di nuovo sotto il sole del Sahara.

Con la continua insistenza su questa dimensione mafiosa (cosa, ripeto, non contestata da nessuno), i mezzi di comunicazione alla fine inducono a chiederci ciò che più conta per questi terroristi: i soldi  (traffico) o la jihad? Il denaro d’origine mafiosa serve a finanziare la jihad oppure la jihad è un alibi per coprire il traffico? Difficile rispondere, ma ciò che è certo è che la confusione tra denaro sporco e l’ideologia rivela che questi gruppi possono contenere al loro interno (e anche alla testa) infiltrati con nessun altro scopo che conformare l’azione terroristica all’agenda dei servizio di stato che servono.

Quello che credo, è che Al Qaeda è uno strumento dello Stato profondo americano che giustifica, dalla fine della guerra fredda, gran parte della proiezione della potenza americana, e che AQIM è la marionetta Maghrebina di questo strumento occulto, ma con una notevole differenza con le altre componenti regionali di Al Qaeda (Afghanistan, Iraq, Yemen …): lo stato profondo americano non controlla direttamente AQIM. E ‘infatti molto probabile che sia la DRS d’Algeria, la sicurezza militare algerina, a controllare AQIM. Ancora una volta, la dimostrazione sarebbe lunga ma esiste ed è stata offerta molto tempo fa da autori svizzeri, inglesi o tedeschi, ma purtroppo non per il francese perché in Francia tutti temono l’Algeria ei suoi sporchi trucchi. Voglio dire che su questo argomento io sono aperto al dibattito, ma di certo non con i discepoli di Glucksmann e Lévy i quali da un lato continuano ad accusare Mosca di terrorismo occulto e dall’altra tacciono di complottisti coloro che hanno compreso che il primo di tutti gli “stati profondi” è quello americano!

A proposito di DRS, mi riferisco qui al lavoro del britannico Jeremy Keenan oppure lo studio molto puntuale “Al Qaeda nel Maghreb o la strana storia del GSPC algerino” di François Geze Sallima e Mellah (settembre 2007). Non vi è alcun dubbio che i GIA sono stati creati durante la guerra civile algerina, come organizzazione contro-insurrezionale, con lo scopo principale di screditare, attraverso atroci crimini commessi contro il popolo, la lotta armata del Fronte Islamico di Salvezza (verso cui, sottolineo, non ho alcuna simpatia, anzi), che aveva vinto le elezioni. Non c’è dubbio sia che questi GIA si sono trasformati in GSPC dopo la guerra civile e sono cresciuti di forza dopo l’11 settembre 2001, quando lo Stato profondo algerino aveva compreso, non solo che lo Stato profondo degli Stati Uniti era dietro Al-Qaeda, ma che, se Algeri non voleva subire l’agenda americana nel Sahara, doveva anticiparlo. Il GSPC è nato dal “magnifico” spirito d’iniziativa algerino il quale ha saputo offrire agli americani il nemico che si aspettavano (fino a prendere nel 2007 il nome di Al Qaeda nel Maghreb islamico) per giustificare la loro presenza nel Sahara (insediamento al servizio di altri interessi più classicamente geostrategici, del petrolio e del gas dei quali parleremo in seguito). In sostanza, Abdelrrazak Para, El Mokhtar Ben Mokhtar e altri, questi personaggi che hanno diretto azioni terroriste e cattura di ostaggi occidentali senza mai farsi prendere e lasciando i loro seguaci a essere uccisi al loro posto, presentano lo stesso profilo di Osama bin Laden, misteriosamente scomparso in mare. In primo luogo hanno lavorato per il profondo stato di quello stesso Stato che hanno poi ufficialmente iniziato a combattere. Bin Laden era un membro della CIA e quasi tutti i capi delle katibas islamiste del GSPC e di AQIM sono ex ufficiali dell’esercito algerino. Ben addestrati questi agenti, infiltrate successivamente (forse in alcuni casi, creati) le cellule combattenti, sono stati in grado di prenderne facilmente il comando.

Una realtà indicibile nei nostri media, a causa dell’ampiezza di interessi economici francesi in Algeria, della collusione quindi delle élite politiche francesi con il regime algerino (occorre osservare ancora recentemente il ministro Valls lodare l’efficienza delle forze speciali algerine … ) … ma una verità comunque da tempo evidente fuori della Francia: AQIM / Polisario, DRS algerino,  il traffico di droga sahariano sono una sola e unica organizzazione del crimine il cui scopo è duplice: l’ arricchimento personale dei generali algerini che sorvegliano il traffico di droga effettuato da capi terroristi; ma anche la sopravvivenza del regime (che va di pari passo con il primo obbiettivo), diventando così il fondamentale baluardo contro il fondamentalismo, un baluardo che l’ondata di rivoluzioni arabe non può raggiungere e che non raggiungerà tanto meno l’Occidente (soprattutto francesi e americani capiranno che non ci sono alternative credibili diverse dal mantenimento del regime algerino). Tuttavia, questo regime è una calamità per la gioventù algerina, priva di futuro, con la disoccupazione al 40%, privata dalla propria “elite” della sua favolosa ricchezza (entrate petrolifere e del gas), e di conseguenza una calamità per la riva nord del Mediterraneo (Europa), che inevitabilmente vedrà dilagare su di essa candidati alla immigrazione sempre più numerosi. Una politica miope della maggior parte dei leader europei!

Grazie al GSPC e ad AQIM, il governo algerino ha potuto apparire, a partire dal 2001, agli occhi degli Stati Uniti e della Francia (per il grande pubblico, almeno, in quanto nelle strutture di potere, nessuno si lascia ingannare) come un baluardo contro l’islamismo radicale nella regione. E la strategia ha funzionato, sino alle rivoluzioni arabe che hanno spazzato via una dopo l’altra (Tunisia, Egitto, Yemen) tutti i regimi autoritari “laici” (un termine da prendere con estrema cautela nei confronti dei paesi musulmani), prima che l’Occidente non attaccasse direttamente chi non era caduto da se stesso (Libia, Siria). Così per il DRS ciò non costituiva l’ombra di un dubbio, l’Algeria era il successivo della lista, a meno di allontanare l’Occidente dal risveglio degli islamisti politici (che sarebbero diventati la maggioranza in molti paesi dopo il crollo dei regimi forti) e riportarli ai “tempi gloriosi” della guerra contro il terrorismo internazionale.

Di questi tre gruppi islamisti che operano in Mali, se mi si chiede “chi controlla chi,” direi che il DRS controlla AQMI mentre il Qatar finanzia e esercita influenza sugli altri due movimenti ( MUJAO e Ansar Dine) con obiettivi radicalmente diversi dall’Algeria come vedremo nella seconda parte.

Un altro elemento che non viene evidenziato è che almeno due di questi gruppi (MUJAO di sicuro, AQMI probabilmente) hanno stretti contatti con il Polisario, il movimento separatista saharawi supportati con base nei campi di Tindouf (territorio algerino). E’ pressoché dimostrato, infatti, che il gruppo di terroristi che avevano sequestrato il sito gasifero di Amenas in Algeria proveniva dai campi di Tindouf, in altre parole dal territorio algerino (e questo anche se l’Algeria ha puntato il dito contro la Libia). Anche in questo caso si tratta di una realtà che cerco di allertare almeno dal 2005, attraverso vari interventi che ho fatto dalla tribuna delle Nazioni Unite, in qualità di esperto nominato dal Marocco , ruolo pienamente assunto da me tanto credo al fondamento storico della sovranità  del Marocco sul Sahara occidentale – ma sovranità “intelligente” in un contesto di maggiore autonomia.

Lo slittamento progressivo (paragonabile al MNLA) del Polisario non solo verso la criminalità (traffico di tutti i tipi), ma anche verso il fondamentalismo religioso dovrebbe essere una fonte di preoccupazione per i paesi occidentali. Dal 2005 numerosi eventi nella regione sub-sahariana mostrano la relazione tra alcuni elementi del Polisario e l’AQIM / Mujao. Questo è il momento di ricordare, inoltre, che i problemi non risolti del separatismo (Tuareg e Sahara occidentale) finiscono malamente purtroppo per degenerare in problemi di islamismo radicale.

Solo una soluzione equilibrata portata a difendere la sovranità degli Stati (Mali, Marocco, Niger …), ma organizzando una reale autonomia per le minoranze nomadi, può contribuire a realizzare la stabilità nella regione.

Per comprendere le motivazioni degli altri attori, dovremmo anche parlare delle questioni legate alle risorse (petrolio, gas, uranio). Tanto gli Stati Uniti, infatti, che la Francia, il Qatar e l’Algeria hanno delle mire importanti sul petrolio e sul gas nel Sahara. Ognuno di questi stati ha interesse a promuovere la situazione geopolitica per collocarsi in una posizione di forza nelle discussioni sulla ripartizione della ricchezza.

Analizzeremo nella seconda parte le questioni del petrolio e del gas e affineremo la nostra analisi degli interessi francesi, dell’Algeria, del Qatar, americani, della Mauritania e della Libia nella crisi attuale.

Fine della prima parte

Aymeric Chauprade

                                                                                                                                                          blog.realpolitik.tv